Réussir son lancement à l'international !

Chez Future4care, notre vocation est de devenir l’écosystème Européen de référence en e-santé.
Pour cela, notre objectif premier, et essentiel, est de regrouper, faire parler et collaborer avec tous les acteurs du système de la santé et du numérique. C’est dans cette démarche que nous avons interrogé le cabinet d’avocats L.co

Publié le 08 juin 2022 à 08h51

 

Chez Future4care, notre vocation est de devenir l’écosystème Européen de référence en e-santé. 

Pour cela, notre objectif premier, et essentiel, est de regrouper, faire parler et collaborer avec tous les acteurs du système de la santé et du numérique. Industriels, entrepreneurs, experts spécialisés ou généralistes, professionnels de santé, patients, toutes les parties prenantes jouant un rôle décisif pour faire progresser la santé numérique. 

C’est dans cette démarche que nous avons interrogé le cabinet d’avocats L.co, représenté par Anne-Laure Girin, avocate en droit des affaires et fondatrice du cabinet, Clarisse Riot juriste HealthTech et e-santé et Constance Guiraud avocate fiscaliste pour vous proposer une analyse sur un sujet clé pour les entrepreneurs : l'internationalisation.  

Il s’agit d’un sujet d’autant plus actuel que la plateforme de télésurveillance cardiaque Implicity, a justement annoncé dans un communiqué du 27 avril avoir finalisé une levée de fonds de 21 millions d’euros, pour financer leur extension vers Europe et les Etats-Unis.  

Quelle stratégie privilégier pour identifier les Etats et/ou territoires sur lesquels étendre une activité en e-santé ? 

De manière générale, toute décision d’ouverture à l’international est précédée par une étude destinée à planifier le schéma de croissance envisagé. 

Dans le cadre de cette étude, les questions suivantes doivent être posées :  

  • Il y a-t-il une demande sur place ? 
  • Est-ce que le marché existe déjà ?   
  • Quel est l’environnement concurrentiel ?  
  • Quelle est la plus-value proposée par rapport aux offres existantes ?  

Pour certaines activités, la clé peut se trouver dans les contrats avec les hospitaliers et les acteurs de santé implantés sur place. 

Pour compléter cette étude, l’entrepreneur doit également mesurer l’étendue de sa « force de frappe » à partir des moyens dont il dispose à l’instant T et, établir le cas échéant une évaluation de ses besoins pour organiser l’extension vers le pays ou le territoire visé.  

Les investissements humains et financiers ne sont évidemment pas les mêmes si l’on souhaite proposer son offre vers un autre Etat Membre de l’Union Européenne ou en dehors de l’Union Européenne par exemple.  

Pour les structures les plus avancées, disposant de moyens plus importants, la stratégie peut se dédoubler. Il peut être envisagé d’aplanir l’environnement concurrentiel et profiter d’une demande du marché visé. C’est par exemple le cas de DOCTOLIB, qui, après une expansion en l’Allemagne, a l’année dernière fait l’acquisition de DOTTORI.IT, l’un des principaux acteurs du marché italien du secteur. 

Il faut également maîtriser les chiffres du marché : l'Europe est le deuxième marché pharmaceutique mondial, et représente 22% des ventes de produits pharmaceutiques dans le monde, tandis que le marché américain reste le plus important, avec près de 46% des ventes mondiales (sources : IQVIA - 2020). 

La nuance à apporter dans le secteur de la santé porte évidemment sur les aspects réglementaires : il reste plus facile de s’étendre vers un pays ayant un système de santé proche de son pays d’origine.  

L’Europe est un marché à part entière, fondé sur des réglementations communes s’agissant des Etats membres de l’Union Européenne : dans le domaine des données personnelles, l’ensemble de Etats Membres sont soumis au célèbre Règlement Général sur la Protection des Données (Règlement UE 2016/679). Dans le secteur particulier des dispositifs médicaux, il existe également le nouveau règlement applicable aux dispositifs médicaux – dont les dispositifs médicaux connectés, pour lequel le régime applicable a fortement été modifié, eu égard à leur classe de risque (règlement UE 2017/745).

En revanche, au sein même d’une zone comme l’Europe, les systèmes varient malgré tout, à certains égards. Par ailleurs, les Etats-Unis sont un marché qui peut être incontournable pour un entrepreneur dans la santé. Cependant, l’entrée sur ce territoire implique un investissement important, même s’il existe une appétence forte pour la e-santé. Lors de la crise sanitaire, les institutions ont en effet privilégié les solutions de e-santé en réduisant même certaines restrictions jusqu’alors applicables pour faciliter l’accès aux soins. C’est particulièrement le cas de la télésanté, dont les cas d’usage aux Etats-Unis ont également été étendus sous l’égide de la FDA.  

Si les coûts de la solution nécessitent une prise en charge par le système de santé, il convient également d’être très au fait des processus de remboursement pour le pays visé : si la solution ne peut, in fine, faire l’objet d’un remboursement, c’est tout l’accès au marché qui peut être est compromis.  

Les systèmes de santé et leurs acteurs sont très différents d’un Etat à un autre, tant d’un point opérationnel que culturel. Comment appréhender cela quand on ouvre un attaque marché ? 

1. Culture :

En matière de santé, la première opposition venant à l’esprit est souvent celle entre la France et les Etats-Unis, principalement en raison du différentiel du système de prise en charge des frais de santé. 

Toutefois, il ne s’agit pas de la seule différence. Certains pays, pourtant proches culturellement de la France, ont leurs propres spécificités.  

Pour reprendre l’exemple de l’Allemagne, qui est un pays fédéral, les opportunités et les interlocuteurs institutionnels peuvent être différents d’une région à une autre : face à ce type de situation, il est alors nécessaire de s’adapter non pas à un pays, mais à une région, et d’avancer au fur-et-à mesure.  

Concernant l’acculturation, nous pouvons aussi citer la différence d’approche du numérique selon les populations. Certains Etats sont depuis plusieurs années habitués au tout numérique, tandis que d’autres sont encore en phase de transition. Cela se ressent nécessairement lorsqu’il s’agit de proposer une solution e-santé à des professionnels de santé ou à des hôpitaux. 

2. Réglementation et opérationnel : 

Aujourd’hui la réglementation applicable aux dispositifs médicaux concerne l’ensemble des Etats Membres de l’Union Européenne (le règlement UE 2017/745 cité plus haut). 

Le fabricant doit donc choisir un organisme habilité à délivrer la certification CE, ce choix s’effectuant sur la base d’une liste des organismes notifiés disponible et actualisée sur la base NANDO (New Approach Notified and Designated Organisations) accessible via le site de la Commission Européenne.  

En revanche, le régime est différent aux Etats Unis : les dispositifs médicaux (et par extension, les DM numériques) doivent passer par une étape de notification auprès de la FDA, appelée communément « 510(k) » (premarket notification). Dans certains cas de figure, une autre procédure est applicable : la « PMA » (premarket approval), concernant les DM les plus à risque. 

Au-delà des différences de procédure, il faut au préalable s’assurer de la bonne qualification de sa solution numérique : celle-ci ne relève pas systématiquement du régime des dispositifs médicaux selon la réglementation envisagée. Un produit considéré comme dispositif médical aux Etats-Unis pourrait avoir une qualification différente en Europe et inversement.  

En effet, dans la législation européenne un logiciel peut être considéré comme un dispositif médical si les trois critères suivants sont remplis :  

  • Le logiciel est destiné à une utilisation à des fins médicales et permet, par exemple, un diagnostic, une aide au diagnostic, un traitement ou une aide au traitement ; 
  • Le logiciel donne un résultat propre au bénéfice d’un seul patient ; 
  • Le logiciel effectue une action sur les données entrantes, telle qu’une analyse afin de fournir une information médicale nouvelle.  

De son côté, la FDA a publié plusieurs guides à destination des fabricants, proposant une définition plus diffuse des dispositifs placés sous son autorité, sans reprendre ces critères.   

Il convient donc de prendre chaque solution au cas par cas et de vérifier sa qualification, et le cas échéant la classe de risque lui étant applicable. 

Comment structurer son implantation à l’étranger ? 

Une fois la première phase de test validée, la question se pose de créer une structure juridique directement dans l’Etat concerné.  

Les aspects techniques sont évidemment laissés aux cabinets d’avocat et prestataires ad hoc. Il est en effet nécessaire de bien cadrer sa structuration et de s’assurer que les potentiels flux financiers entre une structure étrangère et le siège français soient conformes à la réglementation.  

Chaque pays a ses barrières d’accès même dans l’Union Européenne.  

En pratique, il est délicat de faire du portage de salariés d’un pays à l’autre même si cela reste évidemment possible. D’autres alternatives doivent être envisagées. 

Il faut distinguer deux cas de figure. 

Le premier, c'est la volonté pour l'entreprise elle-même de démarcher à un autre pays, pour des considérations propres au business model de la startup.  

Dans ce cas, il convient effectivement de s’appuyer sur des experts locaux, mais également de déployer des ressources internes en local.  

Le deuxième cas de figure se base sur la demande d’un client en France pour ses équipes ou une filiale à l’étranger. 

Les cultures pouvant être radicalement différentes d’un espace à un autre, il faut savoir jongler avec cela et choisir les bonnes options. Travailler avec des acteurs locaux ? Déployer une équipe sur place ? Mixer les deux ? Tout est une question d’analyse de la culture locale, mais également des ressources internes, financières et humaines.  

Dans tous les cas, il est essentiel d’avoir une représentation de l’entité sur place, externalisée ou non, pour que la stratégie prenne vie. Il est impossible de gérer uniquement à distance.  

Par ailleurs, certaines demandes émanent directement au niveau du siège et non du local. Il est d’autant plus important dans ces cas-là de se rendre sur place et d’analyser le vrai besoin local, pour mettre en place la bonne stratégie. Si les enjeux locaux ne sont pas respectés, les deux parties seront perdantes. 

Il est très difficile de standardiser un développement à l’international, chaque projet étant différent. 

Pour synthétiser, il conviendrait de distinguer : 

  • Les enjeux juridiques liés à l’activité visée (ici la e-santé) ;  
  • Les enjeux juridiques et fiscaux liés à la structuration de l’activité (ici la constitution d’une entité privée avec la recherche de bénéfices). 

Dans la première catégorie, nous relevons notamment : 

  • Les sujets relatifs aux données de santé, notamment concernant l’identification des responsables de traitement et des sous-traitants, et l’existence ou non de transferts de données vers et/ou depuis l’international, en dehors de l’Union Européenne ; 
  • Les sujets relatifs à la réglementation applicable aux logiciels dispositifs médicaux en dehors de l’Union Européenne, comme par exemple la procédure dite « 510(k) » aux Etats Unis, encadrée par la Federal Drug Administration (FDA) ;  
  • Les sujets relatifs aux éventuels aspects déontologiques, liés aux professionnels de santé impliqués dans le projet : s’il est prévu d’impliquer des médecins sur place par exemple, une bonne connaissance de leur statut dans le pays concerné est primordiale.  

Dans la seconde catégorie, nous identifions tous les sujets relatifs à la création d’une société ou d’un établissement à l’étranger, et à ses liens avec la société mère de son Etat d’origine.   

Nous relevons notamment :  

  • L’applicabilité des conventions fiscales permettant d’éliminer les doubles impositions ;  
  • Le régime des prix de transferts, dans le cas où des prestations seraient rendues entre les entités du même groupe ; et 
  • Les éventuels impacts en matière de TVA. 

Si la société envisage de réaliser une levée de fonds dont une partie lui servira à financer son ouverture à l’international, cette structuration devra être pensée dès les premiers échanges avec les investisseurs : comme pour toute opération, il est nécessaire d’avoir une feuille de route bien définie sur son projet ! 

Les politiques publiques dans le domaine de la santé cherchent de plus en plus à inclure les porteurs de projets, et tout particulièrement en e-santé. Comment percevez-vous ces initiatives ? Plus généralement, quelles sont les améliorations que vous souhaiteriez apporter sur le système actuel ? 

Certains entrepreneurs considèrent encore que les mesures proposées sont difficile d’accès, tant en raison des pré-requis techniques que de leur mise en place effective. Par ailleurs, il n’y a pas toujours l’enthousiasme espéré de la part des entrepreneurs face aux opportunités mises en place par les pouvoirs publics dans le domaine de la santé.  

Toute initiative doit cependant être saluée, car c’est une preuve que les startups de santé disposent d’une position de plus en plus privilégiée dans le système de santé !  

Aujourd’hui les efforts qui sont réalisés dans le système de santé, en France comme à l’étranger sont salués par beaucoup d’acteurs. Cependant, il faut rester alerte sur la nécessité de sensibiliser encore et même davantage les professionnels de santé à ces nouvelles réglementations et évolutions. Ce sont eux les prescripteurs, sur la base des besoins patients. Si eux-mêmes ne maîtrisent pas les sujets, ils ne pourront pas être partie prenante de ce changement qui doit s’opérer pour que la santé numérique progresse. 

Un dernier mot à destination des entrepreneurs qui nous liront ?  

  1. BIEN S’ENTOURER  

L’internationalisation ne doit pas être effectuée seul : il faut savoir s’entourer et profiter des partenariats qui vous sont proposés.  

A l’image de réseaux comme Future4care avec les experts et des aides R&D et exports via Bpifrance entre autres. 

  

  1. ANTICIPER LES CYCLES DE FINANCEMENTS 

L’idéal est de réfléchir à l’entrée au capital d’investisseurs à la fois européens et américains pour le marché américain. Il a un tout cas une appétence de la part des fonds européens pour les investissements américains.  

Les fonds en général pourront vous accompagner dans le développement international.  

Attention, selon le territoire envisagé, les cycles de financement peuvent être plus longs (ex : marché américain).  

  

  1. SAISIR LES OPPORTUNITES / MAITRISER LES MENACES  

La nouvelle réglementation des dispositifs médicaux en Europe peut avoir un impact important sur la stratégie de développement (entraîne un allongement des délais), il faut en tenir compte. 

Au-delà des marchés européens et américains, il faut également s’intéresser à d’autres marchés qui pourraient être sensibles à l’activité projetée. 

Il faut enfin profiter des initiatives mises en place par les pouvoirs publics (ex : MA SANTE 2022, annonce d’investissement de 400M€ dans le secteur du DM et du DMDIV dans le cadre du plan 2030) Evidemment un contexte électoral est également à prendre en compte pour la prise d’orientations stratégiques. 

 

Merci au cabinet Lco d’avoir apporté ses lumières sur ce sujet crucial de l’international. 

N’hésitez pas à nous écrire, pour nous pousser des sujets que vous aimeriez voir être traités. 

Pour plus d’information sur Future4care, rendez-vous sur www.future4care.com 

Pour plus d’information sur L.co , https://lco.legal/