Le système de santé, un écosystème riche et complexe.

Sur le terrain depuis de nombreuses années, au plus près des patients et professionnels de santé, notre Vice-Président, Olivier Guerin, nous partage son regard sur les enjeux actuels en #eSanté.

Publié le 13 décembre 2021 à 08h52

L'ensemble des acteurs du système de santé s’accordent à dire qu’il est temps de changer les choses.  Il est l’heure d'initier un système davantage axé sur le préventif et sur le prédictif. Il est l’heure pour les professionnels d'être équipés et de mieux prévenir de nouvelles pandémies, l’heure pour les patients de trouver facilement un spécialiste quel que soit le contexte, l’heure d’être diagnostiqué plus tôt, plus vite.   La récente pandémie a révélé les failles d’un système de santé, autrefois avant-gardiste, mais aujourd’hui en panne de transformation.  Pourtant, ce système est composé d’acteurs forts, de professionnels experts et dévoués, d’organisations publiques et privées investies. Parallèlement, il existe des leviers puissants, qui, utilisés de la bonne manière, peuvent accompagner ces acteurs dans cette transformation.  Parmi ces leviers, le numérique évidemment et tous les outils qui en découlent. 

Le professeur Olivier Guérin, membre du conseil scientifique du Président de la République et Vice-Président de Future4care, nous partage sa vision sur ces évolutions en cours et nous explique de quelle manière il est possible d’initier ce changement, grâce au numérique. 

 

N°1 -  Zoom sur le patient, acteur au cœur du système. 

Pour Olivier Guérin, en santé, le patient est de fait la clé de voûte de sa propre prise en charge.   En e-santé, c'est d'autant plus important qu'il doit être non seulement d'accord sur les dispositifs, puisqu'il y a toujours du partage d'informations, mais acteur de son propre dispositif, dans son autonomie et sa façon dont il considère sa santé et qu’il partage ses données de santé avec l'ensemble des professionnels du secteur. 

C’est essentiel que le patient, comme le professionnel de santé, ait conscience qu’il faut avancer dans une logique à la fois de co-construction et d'innovation. C’est pour cela que l'ensemble des acteurs du système de santé doivent montrer aux patients ce qu'il est possible de faire aujourd'hui, grâce aux outils du numérique et ainsi les accompagner dans les usages. 

Ainsi, il est important de rappeler pourquoi le numérique va améliorer l'expérience du patient. 

Ces données sont la clé pour un traitement plus efficace, plus personnalisé, à condition que le patient garde la maîtrise sur les siennes. 

C'est pour cela qu’il doit prendre conscience que cette donnée de santé, lui appartient. La capacité qu'il aura ensuite à partager ses données, à comprendre comment est structuré son parcours grâce à l'aide des outils numériques, lui confèrera plus de confort.  Par ailleurs, les professionnels de santé sont là pour l'épauler, le conseiller. Et c’est d’autant plus facile quand des outils numériques sont à leur service pour simplifier cet accompagnement. 

Cela étant dit, il reste malgré tout un sujet important à évoquer, celui de rendre la e-santé inclusive. 

En effet, l'état de santé a plutôt tendance à se détériorer, notamment avec l'avancée en âge qui est un facteur de risque, notamment des maladies chroniques. Et c'est auprès de cette cible, plus vulnérable, que les efforts doivent se porter pour que l'on puisse aider aussi. 

Il est essentiel d’intensifier ces éléments de formation, d'adoption, de diffusion vers ces populations plus vulnérables, des outils qui leur sont nécessaires pour la gestion de leur bonne santé. Et c'est la mission des professionnels de santé, de démocratiser ces dispositifs, d’expliquer, d’informer et former les patients eux-mêmes à l'utilisation de ces outils utiles pour eux. 

N°2 Les professionnels de santé, eux aussi, doivent passer le cap et s’engager avec le numérique 

Un système de santé sans les professionnels, ça n'existe évidemment pas. Dans le système que nous connaissons actuellement, le médecin traitant est une clé de voûte puisque c'est lui qui est l'intégrateur de l'ensemble des données de santé pour son patient. 

Cependant, nous nous apercevons avec le temps, avec le changement aussi des besoins de santé publique, que c'est une succession d'acteurs du système de santé qui sont efficaces pour le malade. 

Ainsi, les acteurs du système de santé au sens large sont évidemment les professionnels qui doivent agir, mais qui doivent agir de manière coordonnée. 

Quoi de mieux pour coordonner que, notamment, des solutions et des produits numériques qui permettent cet exercice si spécifique du parcours patient et de sa coordination. 

Cependant, les outils numériques par les médecins, et notamment les médecins généralistes, sont considérés à l'heure actuelle comme des gadgets. Pourquoi ? 

Parce que le système de santé français s'est construit sur la succession d'actes thérapeutiques.  C'est d’ailleurs pour cela que l’on paie la consultation. 

Mais, les besoins de santé publique ont changé, notamment avec la chronicisation des maladies, nous avons donc besoin de changer aussi la vision que nous avons, nous, professionnels de santé, sur le service que l’on doit rendre aux patients. Et cela nous oblige à travailler différemment et pour celat nous avons besoin d'outils différents et c'est là tout le sens de l'innovation numérique finalement. 

Toutes ces données dont nous avons besoin, nous devons être en capacité de les analyser, ou en tout cas d'avoir les outils qui nous permettent d'en tirer des signaux pour être en permanence en vigilance. Cela permettra d'éviter ce qu'on appelle les décompensations des maladies chroniques, qui sont à l'origine de la dégradation de l'état de santé de nos concitoyens, lorsque le traitement n'est pas à la hauteur. Finalement, c'est une grande chance, mais cela modifie encore une fois et avant tout notre vision et nos pratiques. 

Les outils numériques en santé font peur, ou génèrent de l'anxiété, auprès des professionnels de santé, tout simplement parce que cela nous oblige à travailler différemment. 

Cependant, nous avons choisi nos métiers parce que nous voulons le meilleur pour nos malades. Cette conviction est partagée par tous les professionnels de santé.  

C'est à nous, professionnels, de nous saisir des sujets d'organisation et d'aller dire à nos tutelles : “Finalement, le modèle dans lequel vous nous mettez, ces histoires d'actes ponctuels de consultation payées les unes derrière les autres, par exemple, cela ne nous convient pas. Cela ne nous convient pas, parce que ça nous oblige à ne pas faire correctement notre métier. Et ça, pour nous, c'est insupportable.” 

Fondamentalement, quand un outil nous permet de faire mieux, nous finissons finalement à l'adopter.  

N°3 Le numérique pour unir acteurs privés et publiques 

L’écosystème de santé est assez complexe puisqu'il comprend les professionnels de santé, mais aussi et c'est tout le sujet de Future4care, des industriels capables de nous amener des solutions nouvelles.   N’oublions pas non plus d’autres acteurs, trop souvent dans l’ombre, qui sont les collectivités territoriales. Notamment les mairies, les départements et les régions. Acteurs incontournables sur les compétences de développement économique et notamment sur les sujets de prévention.   Il existe aussi une spécificité française. Ce sont les associations de patients. Des acteurs essentiels à intégrer dans cet écosystème, parce qu'ils ont des connaissances extrêmement fines dont nous avons besoin. Générer de l'innovation sans eux est quasiment impossible.  

Cela étant dit, nul n’est sans savoir qu’il existe une opposition française ancienne, entre ces acteurs privés et ceux du publique.  

La présence d’un professeur et médecin comme Vice-Président de Future4care n’est pas anodine. C'est aussi pour faire ce lien entre ces deux typologies d’acteurs, qu'ils soient dans le soin ou dans l'industrie.   Ce rapprochement a, tout simplement, pour finalité de rendre service aux malades. A partir du moment où cet objectif est partagé, il n'y a plus de frontière entre le privé et le public, pour peu que l’on mette les gardes fous nécessaires, à la fois de respect du patient, de respect de son secret et enfin de respect de sa personne et de son autonomie. Il faut que nous soyons tous au rendez-vous.

C'est comme cela que nous serons à la hauteur pour nos concitoyens et pour nous-mêmes, futurs malades potentiels. 

Cependant, il est évident qu’il y a une fragmentation, due à cette opposition ancestrale.  Cette fragmentation, dans le système de santé, qui fait si peur, est interne à ce que l’on appelle traditionnellement la santé. Mais elle est aussi accompagnée de deux autres axes.  L'OMS le dit, la santé est médico psycho sociale. L’axe sanitaire tel qu'on l'entend, c'est le médico. Mais il y a aussi le psycho.  Nous le vivons avec le Covid, nous l’avons vécu avec des drames de masse, à l'image des attentats de 2015 sur notre territoire.   Enfin, l’axe social. La santé n'est pas décorrélée de notre environnement social, de notre insertion dans la société et notamment pour les plus précaires, les plus vulnérables d'entre nous. C'est pour eux qu'il faut faire le plus de lien et pour lequel les outils numériques sont aussi les plus utiles. 

Cette fragmentation est donc multiple. Ensemble, faisons le pari de le faire, de façon coordonnée, pour prouver que nous sommes de bonne volonté. Ce sont les outils numériques, qui nous aideront à y parvenir, car ce sont les meilleurs leviers de défragmentation du système de santé, encore une fois, à condition que leur genèse, cette co-conception de l'innovation, soit déjà partagée par les patients, par les professionnels de santé, avec les industriels qui nous amènent les solutions.  

Quel rôle pour Future4care ? 

Les patients sont au cœur du dispositif, il ne peut pas y avoir d'innovation sans co-conception avec eux, puisque ces innovations, ils vont les utiliser pour leur propre santé.   Cette co-construction, c'est l'ADN de Future4care C’est lorsque tout le monde sera d'accord et rassemblé que nous arriverons à implanter ces nouvelles solutions qui sont avant tout destinées aux malades, aux patients et à tous les citoyens qui veulent préserver leur santé tout au long de leur vie.   Pour ce faire, nous comptons associer dès le début, les professionnels de santé aux côtés de la communauté des patients. Le tout, avec au centre, celles et ceux qui sont capables d'amener des solutions, c'est à dire les entrepreneurs. Ils sont là pour nous amener leur intelligence créative et leur capacité de trouver des solutions à nos questions, à nous, professionnels de santé, comme aux questions de nos patients.